"La Vierge Rolin de Jan Van Eyck, œuvre majeure de l’art occidental, se distingue par sa dimension méditative et par sa composition audacieuse.
L’œuvre est une scène de présentation à la Vierge dans laquelle Rolin, revêtu d’un somptueux costume, est représenté à la même échelle, à la même hauteur et dans le même espace que la Vierge et le Christ, qui le bénit sans l’intercession d’un saint patron, dans un face-à-face ou le visage fortement individualisé de Rolin est l’élément central du tableau.
L’architecture peinte par Van Eyck est un décor imaginaire précieux et onirique mêlant des éléments d’église romane et de palais méditerranéens et dont les chapiteaux stylisés représentant des épisodes de la Genèse semblent guider la prière de Rolin.
Par les trois arches aux chapiteaux richement ouvragés, le regard plonge dans le paysage dans lequel Van Eyck déploie tout son talent de miniaturiste pour créer une représentation idéalisée et hypnotique des Pays-Bas bourguignons.
Le jardin intérieur, avec son échelle singulière par rapport aux autres plans du tableau, renvoie au thème traditionnel de la Vierge dans un jardin clos peuplé d’animaux et de plantes minutieusement rendus.
Deux petits personnages orientent le regard du lecteur et nous invitent à plonger dans le paysage en suivant l’homme au turban rouge, allusion possible et probable à l’artiste.
La Vierge du chancelier Rolin cristallise à bien des égards les tensions qui traversent l’art flamand dans le premier tiers du XVe siècle, entre tradition médiévale et expérimentations révolutionnaires."
Commissariat : Sophie Caron, conservatrice au département des Peintures, musée du Louvre.